Les musulmans, une minorité,, qui représente 4 % des 55 millions de Birmans, est de nouveau victime de véritables pogroms perpétrés par la population bouddhiste.

"Ces groupes de civils bouddhistes ont été fanatisés par une minorité de moines extrémistes", explique Maël Raynaud, "Ces religieux tirent parti du profond racisme existant au sein de la société birmane". Un chercheur évoque "des autocollants représentant le nombre 969, distribués à des responsables de magasin et à des taxis, afin qu'ils l'apposent sur leur commerce et garantissent ainsi leur caractère bouddhiste". Cette campagne ouvertement raciste et anti-musulmane a tourné à l'invitation au meurtre. Elle est principalement le fait des moines bamars, l'ethnie majoritaire d'un pays qui en compte 135.

Principale cible de cette politique discriminatoire, la communauté des Rohingyas. Ces musulmans d'origine bengalie, dont 800 000 peuplent l'État de l'Arakan, au nord-ouest du pays, ont été déchus de la citoyenneté en 1982.

Extorsion de leurs terres, difficultés à se marier ou interdiction d'étudier, les Rohingyas sont, d'après l'ONU, la "minorité la plus persécutée au monde". Si elle fait tout pour les forcer à quitter la Birmanie, quitte à les placer dans des camps aux conditions de vie misérables, la junte militaire va en parallèle attiser chez les habitants de l'Arakan (les Arakanais) une véritable haine anti-Rohingyas. "Il s'est développé chez eux une réelle peur par méconnaissance de l'islam", raconte Alexandra de Mersan. "Les Arakanais ont notamment été très choqués par la destruction par les talibans des Bouddhas de Bâmiyân, en mars 2001 en Afghanistan, mais aussi par le 11 Septembre, dont les images ont été allègrement diffusées par la télévision birmane."

Le départ de la junte du pouvoir et la démocratisation du pays ne pouvaient donc qu'exacerber ce ressentiment. "Les haines, retenues par des chapes de plomb, se sont alors exprimées au grand jour", résume l'analyste Maël Raynaud. "Pour les Arkanais, la démocratie signifiait dès lors que tout était permis".

2013.03.29 Le Point.fr